Polyamour : comment fait-on pour vivre plusieurs histoires parallèles ?

Dans son livre "Polyamoureuse", Lucie Bellan nous parle de son expérience et dénonce bon nombre d’idées reçues et de clichés sur le polyamour. Ici, elle nous parle de comment elle a réussi à articuler ses deux histoires amoureuses.

Mais concrètement, comment on fait pour vivre des histoires parallèles ?

Françoise Simpère, forte de plusieurs décennies d’expérience des amours pluriels, raconte : « Lorsque nous avons décidé, avec mon mari, d’avoir la liberté de tisser des liens parallèles, à la fois intenses et différents, j’ai ressenti le besoin d’un lieu qui me permettrait de ne pas mélanger vie familiale et vie personnelle. Faute de moyens financiers, j’ai bourlingué durant des années de studios prêtés par des ami(e)s en chambres d’hôtels, car je n’aimais pas non plus investir la chambre conjugale de mes amants mariés. Un jour enfin, j’ai eu les moyens d’acheter une garçonnière. » Pour l’autrice, ce lieu n’est pas réservé exclusivement à ses amours mais avant tout à elle : « Il m’arrive de passer des soirées seule dans ce que j’appelle mon univers parallèle ou ma planète, juste pour retrouver un calme intérieur. On y trouve du silence, sans téléphone ni télévision, des livres, des senteurs douces et la musique que j’aime. Lorsque je n’ai pas le moral, c’est aussi là que je me réfugie. Ce territoire de 40 m2 est immense ; il me permet de vivre tranquillement mes relations amoureuses, et aussi de me ressourcer, de délimiter clairement ce qui appartient à la famille et ce qui m’appartient à moi. »

J’ai eu, comme Françoise Simpère, des problématiques matérielles liées à la bonne marche de mes amours. Comme elle, la maison familiale n’est pas le lieu où je souhaite retrouver mes amours parallèles. Pendant des mois donc, il a fallu trouver des Airbnb accueillants, des chambres d’hôtels bon marché mais quand même qualitatives, profiter des prêts d’appartements appartenant à des amies. Jusqu’à ce qu’enfin un deuxième domicile conjugal s’impose : l’appartement partagé avec mon deuxième compagnon. Fini la charge financière du lieu où se retrouver, bonjour la charge mentale et financière du quotidien le plus trivial. Je dis souvent pour plaisanter que le polyamour c’est deux fois plus de papier toilette à acheter et c’est vrai dans mon cas. C’est aussi deux fois plus de frigos à remplir, deux fois plus de repas auxquels il faut penser, de factures d’électricité, d’internet ou de gaz, de problèmes de pannes de matériel, de plombiers à appeler.

Paradoxalement, c’est l’étendue de cette charge, autant psychologique que financière, qui m’a permis de m’en libérer. C’est devenu une condition sine qua non à la bonne marche de mes amours : « Si on veut que ça fonctionne, alors il faut faire certaines choses à ma place. » J’ai arrêté de me soucier du remplissage du frigo et du menu de la semaine sauf quand c’était nécessaire. J’ai eu la chance d’avoir des partenaires qui ont compris que l’épuisement que je ressentais et donc la souffrance avec laquelle je vivais ne venaient principalement que de sujets triviaux qui étaient tout à fait à leur portée. Je ne suis pas plus compétente pour les tâches domestiques qu’eux et c’est donc naturel de partager cette charge. Dans un sens, être polyamoureuse m’a rapprochée d’un idéal féministe en me libérant d’une grande partie de la charge mentale. Mais j’ai bien conscience que c’est majoritairement dû à la bonne volonté de mes partenaires.

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